Archéologie : des autels tauroboliques du Mont-Dol au Mithraeum de Londres

Professeur de Chateaubriand, Marie François Rever  (1753-1828) fut un archéologue et l’auteur d’un passionnant manuscrit relatif à l’existence d’autels tauroboliques au Mont-Dol (situé en baie du Mont-Saint-Michel) et dont les origines antiques restent encore à élucider.

Le Musée de Bretagne a bien détenu un moulage d’un « autel taurobolique du Mont-Dol exécuté sur le modèle en plâtre appartenant à la ville de Dol », entré en collection en 1882 (n° inv 882.0020.1). Malheureusement, s’il figure sur les anciens inventaires, il n’a jamais été localisé ni récolé, et donc n’est pas considéré aujourd’hui comme présent dans les collections. Selon sa conservatrice du patrimoine, le Musée de Bretagne ne possède en outre aucun visuel.

Le récolement n’est actuellement pas entièrement achevé au musée (plus de 800 000 items conservés) et nous devrions voir son aboutissement en 2025. L’occasion d’espérer que de nouvelles recherches permettent de le retrouver en Petite-Bretagne. Pour patienter,  il convient de questionner les interprétations quant à l’héritage perse auquel il est associé en Grande-Bretagne.

Londres a été fondée vers 48 après JC, quelques années après la conquête romaine en 43 après JC. Rapidement construite comme une ville commerçante transfrontalière, les romains et les britanniques profitent allègrement des nouvelles opportunités commerciales offertes par les passages de l’armée romaine. A l’époque antique, Londres s’appelait Londinium. La Tamise elle-même était beaucoup plus large, avec plus d’îles et de marais créés par les marées.

Dans la culture romaine, il était courant pour les gens de pratiquer et de suivre la religion publique, mais aussi d’entretenir des croyances personnelles. Répandu dans tout l’Empire depuis sa source indo-iranienne via des militaires et des marchands, le mithraïsme était une croyance privée et elle est apparue à la même époque avec deux autres: Isis (une déesse égyptienne) et le premier christianisme romain. Ces trois religions ou cultes avaient donc des liens avec des croyances religieuses originaires de l’Empire romain oriental; de là elles se sont progressivement rendues en Grande-Bretagne.

Un temple de Mithra a été découvert dans la city de Londres en 1954 lors de fouilles menées par le professeur W. F. Grimes et Audrey Williams. Le professeur Grimes et son équipe avaient entrepris des fouilles de «sauvetage» dans des zones de la ville qui avaient été détruites lors du Blitz de la Seconde Guerre mondiale (terme allemand signifiant « éclair »). Personne n’était au courant de l’existence d’un temple sur le site avant les fouilles – totalement découvert par accident. Aussi, lors des premières fouilles, les archéologues n’anticipaient pas beaucoup de réaction du public. Cependant, la découverte d’une sculpture de Mithra a été publiée dans le Sunday Times, et le lendemain, de nombreuses personnes sont venues voir les premières fouilles de ce temple mystérieux. L’intérêt grandissant du public a conduit à une extension des fouilles et au cours des trois semaines suivantes des milliers de personnes faisaient la queue chaque jour pour le voir.

Le temple de Mithra était-il le seul temple de Londinium? Non, quelques autres ont été identifiés grâce à des découvertes archéologiques; l’un près de l’endroit où se trouve aujourd’hui Old Bailey et le temple Tabard près du tube Borough moderne à Southwark. Un temple romain a peut-être été situé sur le site de la cathédrale Saint-Paul. Mais nous ne savons pas à quels dieux ou déesses ces temples étaient dédiés. Le Temple de Mithra est le seul temple où le bâtiment et l’iconographie du dieu auquel il était dédié ont été retrouvés ensemble.

Au cœur de la city, Bloomberg s’est porté acquéreur du terrain sur lequel la découverte originale avait été faite, pour construire son nouveau siège européen. Le nouveau bâtiment a été conçu dès le départ pour inclure une réinterprétation complète du temple de Mithra. Sa construction a également conduit à un énorme projet archéologique qui a mis au jour des milliers d’objets anciens de Londres, y compris des fragments de rares tablettes d’écriture romaines. Dès la conception du projet, la priorité était de permettre une reconstruction du temple qui reflétait mieux son emplacement d’origine, son apparence et son importance.

Comme certaines parties du temple ont survécu à l’emplacement d’origine, il n’a pas été possible de le reconstruire exactement là où il avait été trouvé. Cependant, Bloomberg a travaillé en étroite collaboration avec le Museum of London Archaeology (MOLA) pour créer un nouveau London Mithraeum, situé à la profondeur d’origine de la découverte de 1954 et à seulement quelques mètres de l’emplacement d’origine.

Le mithraïsme est généralement appelé «culte du mystère» car ses rituels et ses activités religieuses étaient tenus secrets. À partir de preuves archéologiques, nous avons appris que des cérémonies d’initiation impliquaient lumière, son, encens et même de la fumée.

Le passage symbolique de la flamme olympique prévu en 2024 en baie du Mont-Saint-Michel pourrait être l’occasion de relancer des recherches archéologiques sur ce site dont l’héritage grec et perse font partie des recherches inédites qui figurent dans le fameux manuscrit de l’archéologue Marie François Rever (1753-1828) sur les autels tauroboliques du Mont-Dol : aux origines des observations archéologiques de Chateaubriand.

Si la Galerie du temps dans l’enceinte du Louvre à Lens explore l’importance des traces de ce culte d’origine perse et ses autels tauroboliques, d’autres villes ont récemment entrepris des découvertes archéologiques sur ce sujet comme Angers et Strasbourg.

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