Les routes d’émigration et d’exil de Lanzarote et Fuerteventura au Venezuela, jusqu’en 1960
Le premier décompte officiel des émigrants des îles Canaries partis de l’autre côté de l’Atlantique au Venezuela figure dans les archives de l’Institut espagnol de l’émigration dont des données remontent à 1887, date à laquelle les consuls des pays respectifs effectuaient un recensement assorti d’informations en matière d’état civil. Ainsi, on recensait à cette date au Venezuela près de 560 espagnols originaires des îles Canaries.
Le Venezuela, légalement et illégalement, devint un endroit recherché pour l’émigration, surtout après la Seconde Guerre mondiale, étant donné qu’avec une petite population (selon un recensement de 1945 : 4 527 000 habitants), le pays avait reçu un revenu annuel de plus de 500 millions de dollars, grâce aux redevances de l’État sur l’exploitation étrangère de son pétrole.
Même s’il faut souligner que ce fabuleux flot de dollars a cependant produit un grand paradoxe économique, car il a presque disparu de l’ensemble de l’économie nationale. Ainsi, au cours de ces années de développement pro-pipeline au détriment des économies agricoles et d’élevage, la demande en main-d’œuvre pour le pétrole et les salaires élevés qui ont été générés ont perturbé l’économie nationale.
Bien qu’il s’agisse d’une question qui n’influence pas les émigrés, mais plutôt les ressortissants mêmes du pays. Tout le monde avait envie de traverser l’Atlantique, et d’autant plus avec la situation économique qui existait en Espagne à partir de 1939.
Ainsi, légalement ou illégalement, on cherchait une issue à la crise. Pour immigrer légalement, il fallait avoir les documents en règle. Et l’une des exigences essentielles était l’autorisation ou l’obtention d’un bon des autorités espagnoles.
L’hémorragie des navires canariens se dirigeant vers le Venezuela était continue. Le phénomène s’amplifia depuis la fin de la guerre d’Espagne jusqu’à la fin des années 50.
Ainsi, dans un écrit du directeur général de la politique étrangère, en date du 27 mai 1949, on rapporte que le gouvernement vénézuélien se plaignait des arrivées continues de bateaux canariens, qui transportaient des émigrants clandestins.
Et comme le gouvernement vénézuélien était prêt à adopter des mesures drastiques concernant ces émigrés, procéder à leur détention ou à leur retour en Espagne en son nom ; il fut donc demandé qu’un film soit diffusé dans lequel étaient exposés ces émigrés clandestins ; en plus de renforcer la surveillance dans les ports canariens, afin d’éviter que cela se répète.
Comme solution pour que ces émigrés soient légaux, la Légation d’Espagne à Caracas a fourni aux Espagnols qui en faisaient la demande un passeport qui leur permettait de rejoindre Curaçao, Aruba, Trinidad ou la Colombie, et de là, ils ont demandé légalement l’entrée.
Le nombre de navires quittant les îles Canaries était si important que, selon un rapport du ministère des Affaires étrangères de mai 1949, d’autres migrations ont touché les ports brésiliens ou centraméricains.
Concernant le nombre de navires évadés, il peut s’élever à plus d’une quarantaine, ce qui représente la moitié de la flotte de pêche des îles Canaries à cette date.
Bien que dans la plupart des rapports, comme on peut le constater, cela ne soit pas fait distinction entre les habitants des Canaries, le journal “El Universal”, de Caracas, le 4 février 1949, affirme que le voilier “El Maruca” est livré avec 31 immigrants de Lanzarote, pour être introduits illégalement en Venezuela.
Avec l’arrivée du « Maruca », ce journal indiquait qu’il y avait 31 bateaux arrivés dans les eaux vénézuéliennes.