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Etienne Chenevier, la passion du piano pour la bonne cause

Rencontre avec Etienne Chenevier, qui se rendra à Hong Kong pour un concert caritatif au profit de PSE et Mayaa le 19 janvier 2024.

Bonjour Etienne, d’où vient votre passion pour la musique et plus particulièrement pour Chopin et Schubert ?

Bonjour Marc. En fait j’ai commencé l’étude du piano à l’âge de 5 ans et à plusieurs reprises s’est posée la question, soulevée par ma professeur, de devenir pianiste concertiste. Décision difficile pour un instrument comme le piano, et qui fut close définitivement quand je suis entré en Math’Sup, âge limite des concours d’entrée au Conservatoire oblige… il a bien fallut décider !

Mais j’ai toujours gardé un contact étroit avec l’instrument, ai gardé une pratique intensive avec mes professeurs et des maîtres jusqu’à mon départ en Asie en 1993 à l’âge de 36 ans, et joue en public (récital ou musique de chambre) depuis 1988, au moins une fois par an.

Chopin et Schubert… mes programmes changent chaque année, et le piano est par essence le grand instrument du XIXè siècle romantique. Ces 2 auteurs sont des références absolues, l’un (Chopin) plus tard que l’autre (Schubert), mais tous deux de la première moitié du siècle, quand le piano a pris son essor pour devenir l’instrument puissant qu’il est aujourd’hui, et quand le discours musical s’est libéré des formes classiques vers des formes faisant plus part à l’improvisation et à la fantaisie.

Pourquoi avoir choisi Hong Kong pour ce concert ?

Je suis en Asie depuis 1993, à l’époque j’étais en Chine pendant 3 ans, puis j’ai rejoint Singapour, où je réside maintenant, tout en montant des projets hôteliers au Cambodge. Ce programme a été préparé pour des récitals en France qui ont eu lieu en octobre 2023, tous au bénéfice d’œuvres caritatives. Etant quasi-résident au Cambodge, où je joue régulièrement dans les festivals locaux, s’est rapidement posée la question de soutenir PSE, et comme PSE organise des spectacles à Hong Kong pour réunir des fonds, c’est ainsi qu’est venue l’idée de ce concert, finalement au bénéfice à la fois de PSE (Pour un Sourire d’Enfants, active au Cambodge) et de MAYAA (active à Hong Kong et au Népal).

Concert avec Jiri Heger en 2003 à Prague au Clementinum

Vous avez une carrière professionnelle bien remplie, quelle place a pris la musique et comment avez-vous réussi à concilier votre passion avec votre emploi du temps ?

Ah, c’est toute la difficulté ! La réponse est celle que vous donnera toute personne cumulant une carrière professionnelle soutenue, et une activité artistique ou sportive de haut niveau : il faut dégager du temps, et travailler beaucoup ! En pratique, sur mes temps libres et parfois dans la semaine, je parviens à travailler mon piano à peu près 8h par semaine. Ce montant n’a guère varié avec le temps, à part pendant les 3 ans passés en Chine de 1993 à 1995, où hélas je n’ai pu travailler correctement, même si j’ai pu organiser 3 master classes et récitals de mélodies avec la soprano française Nicole Monestier à Pékin Shanghai et Canton en février 1994 grâce au soutien de l’Ambassade de France, expérience inoubliable dans la Chine de l’époque…

A Singapour j’ai eu la chance d’arriver fin 1995, à une époque où les têtes de pupitre de l’Orchestre Symphonique de Singapour, quasiment toutes étrangères et de très haut niveau (russes, tchèques, albanais, américains, etc), se plaignaient de ne pouvoir faire de la musique de chambre de qualité, faute de pianistes désireux de s’y mettre, et il est vrai qu’à l’époque les pianistes Singapouriens jouaient peu sur place, préférant des carrières de professeur. C’est ainsi que j’ai pu participer à la création des Concert Chamber Music Series de l’Orchestre fin 1998, et nouer des coopérations fructueuses avec certains musiciens de l’Orchestre qui ont permis l’organisation de concerts de musique de chambre de très bon niveau, dont certains en Europe (récitals piano et alto à Prague en 2002 et 2003 avec le premier alto solo, concert en trio pour le départ de Singapour de la première violoncelle solo au Conservatoire de Singapour en 2009). Cette situation a depuis évolué, avec notamment la création du Conservatoire de Singapour en 2005, et à l’expansion de Singapour comme place de concert internationale dans la décennie 2010. Singapour a maintenant une vie de concerts plus animée qu’à l’époque où j’y suis arrivé.

Concert de trio de 2009 à Singapour

Avez-vous d’autres projets de concerts similaires ?

Depuis 2010 je jouais surtout des récitals ou de la musique de chambre au Cambodge à l’occasion du Festival International de Musique de Phnom Penh, puisque mes obligations professionnelles dans le montage de projets hôteliers au Cambodge m’empêchaient d’être assez disponible sur Singapour pour le travail avec d’autres musiciens, mais me rattachaient au Cambodge pour de longues périodes. Depuis 2018 j’ai repris l’organisation de récitals en France pour des œuvres caritatives, pratique interrompue en 1998 lorsque je me suis ancré en Asie et ai commencé à jouer sur Singapour, et cette série de récitals de 2023 est la reprise d’une activité qui avait été hélas interrompue pendant le COVID. Mon prochain récital est prévu pour le début de 2025, à la fois en France et sans doute en Asie également, mais naturellement je reste ouvert à des opportunités qui se présenteraient avant en musique de chambre ou avec des chanteurs…

Concert avec Jiri Heger en 2003 à Prague au Clementinum

Avez-vous des conseils pour ceux qui s’intéressent à la musique et souhaitent s’inspirer de votre parcours ?

Le premier conseil est de garder le contact avec l’instrument ! cela va de soi, me direz-vous, mais outre que ça vous oblige à discipliner un peu votre emploi du temps ceci implique souvent de conserver un professeur qui accepte de prendre des élèves adultes (ils ne l’acceptent pas tous…), car cela permet de continuer à progresser dans le répertoire, de recevoir des idées de programme qu’on n’aurait pas toujours spontanément, et également de participer à des événements si ce professeur est bien branché sur la vie musicale de l’endroit où vous habitez. Car le deuxième conseil est aussi important que le premier : trouver des occasions de jouer ! et ce n’est pas toujours simple selon l’endroit où l’on habite et l’instrument qu’on joue.

La problématique n’est pas la même en effet selon qu’on joue d’un instrument d’orchestre, qu’on fait du chant ou qu’on joue du piano. Pour un instrument d’orchestre, il est parfois difficile de faire partie d’un ensemble quand on est “amateur” ou “grand amateur”, car il n’y a pas ce genre d’opportunités partout. Pour le chant, il y a pas mal d’opportunités de pratiquer et de jouer en public (chorale, ensemble vocal, voire opéra par des troupes d’amateurs). Pour le piano, la possibilité de jouer en public ne va effectivement pas de soi, et peut décourager certains de continuer à travailler leur instrument, c’est pour cela que je recommande aux pianistes amateurs de rester branchés au milieu local via leur professeur, et donc de conserver un professeur. Les “master classes” et autres universités d’été sont également un très bon moyen de pratiquer en dehors de chez soi, beaucoup d’entre elles acceptent des amateurs de bon niveau, et elles sont sources d’enrichissement artistique personnel et de rencontres intéressantes. Celles qui acceptent des amateurs de bon niveau sont souvent en Europe, hélas… mais cela permet une pause annuelle “culture” enrichissante !

Enregistrement d’un CD en 2003 au Conservatoire de Prague

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