Qui a inventé l’expression : “L’agriculture, c’est le pétrole de la France” ?
En 1921, Lucie Dior est appelé par Aristide Briand comme ministre du Commerce puis nommé ministre du Commerce et de l’Industrie en 1924 par Raymond Poincaré. La saga familiale des Dior entre terre et mer avait à cette époque très largement dépassé le rayonnement historique de Granville et la baie du Mont-Saint-Michel. L’esprit conquérant dans les engrais chimiques avec l’usine Dior de Rennes (plaine de Baud) et les sites de Landerneau et Brest commençaient déjà à inspirer d’autres industries innovantes elles-mêmes stimulées par un mouvement de capitalisme familial.
Pionnière de l’importation des guanos du Pérou et de la fabrication du guano dissous, la maison Dior a été aussi la première à vulgariser en France l’emploi des scories de déphosphoration mélangées à l’acide sulfurique . En 1860, celle-ci avait obtenu le marché de la récolte des boues domestiques de Granville, qu’elle revendait aux agriculteurs une fois transformées et fermentées.
La valorisation de nouvelles ressources liées à la mer a longtemps rythmé l’économie locale des cités corsaires de Granville et Saint-Malo.
Avec le temps, les industries Probiomer fondées par Théophile Lognoné comme bon nombre d’entreprises de la baie du Mont-Saint-Michel ont fait évoluer leur modèle économique par le jeu de la concurrence : à l’instar de la TIMAC de Saint-Malo (Traitement Industriel du Maërl en Amendements Calcaires).
Très vite, une compétition directe s’est jouée sur le maërl. La concurrence a été très difficile. Il fallait donc rebondir et trouver de nouvelles idées sur les minéraux marins et la nutrition.
Probiomer a donc donné naissance à de nouvelles sociétés porteuses d’innovation et orientées au départ sur la nutrition calcique de la filière avicole mais aussi sur les algues, les alginates, les oligo-éléments marins etc.
Un basculement important a été de nourrir une culture de propriété industrielle avec des brevets. L’ensemble des procédés ont été brevetés avant de les industrialiser.
Enfin, il était nécessaire de s’appuyer sur une forte émulation locale pour décloisonner l’innovation.
Passionné de découvertes, Théophile Lognoné a reconverti des micro-techniques d’horlogerie pour exploiter des minéraux marins et développer de recherches appliquées au domaine de la nutrition-santé. Il passait beaucoup de temps dans la baie du Mont-Saint-Michel, mais aussi dans l’archipel de Chausey et les îles Anglo-Normandes.
Sa vision de l’innovation transmanche a fait l’objet de recherches et de conférences, dans le cadre du jumelage entre Rennes et Exeter, tout comme les liens de recherche et d’innovation avec des communes du territoire (canal de Betton, Saint-Grégoire et son moulin de la Charbonnière).
Pour réussir son pari avec les prochaines générations, Théophile Lognoné a posé les bases d’un environnement familial multi-entrepreneur. Il entendait que le savoir-faire soit transmis de père en fils, de génération en génération pour innover. “Nous ne sommes pas une génération d’héritiers, nous sommes une génération d’entrepreneurs”. Il accordait une importance à la prospective et à la recherche appliquée : “L’horlogerie a besoin d’OPA : Oser, Préparer et Anticiper le monde de demain”.
En 1940, bien qu’exempté de toutes obligations militaires, en raison de charges de famille, Théophile Lognoné fut volontaire à l’usine d’aviation Breguet, en qualité de mécanicien de précision, ce qui lui rappela sa première profession, celle d’horloger. Les temps pionniers de l’aviation sont nés dans des hangars à bateaux avec les premiers hydravions en bois et en tissu.
Les fondateurs de Breguet Aviation étaient eux-mêmes descendants d’un horloger, Abraham-Louis Breguet, né à Neuchâtel le 10 janvier 1747 (alors principauté du royaume de Prusse) et mort à Paris le 17 septembre 1823, horloger et physicien français d’origine neuchâteloise, actif à son compte à Paris depuis 1775, nommé horloger de la marine et artiste adjoint au Bureau des Longitudes en 1815, et membre de l’Académie des sciences en 1816.
En quête de nouveaux défis, Théophile Lognoné avait choisi à la fin de sa vie de continuer à réfléchir à de nouveaux projets d’usine de nutrition et d’engrais, à base de produits marins.
L’agriculture est bel et bien le pétrole de la France.